Vous l’aurez compris, l’idée est simple, il s’agit de chercher la lumière. Et peut-être que plus l’obscurité est forte et à l’origine de contrastes prononcés, plus les couleurs, en réponse, seront douces.
Cette recherche peut emprunter divers chemins : attirer le regard sur la lumière, la filtrer, la colorer, faire de celle-ci la protagoniste de peintures qui n’ont pas pour fonction de représenter quelque chose, seulement de capter et de retenir l’attention sur des matières.
La couleur sortie d’un tube de peinture, sa texture, sa brillance, son extrême douceur, la spontanéité avec laquelle elle s’adapte et se transforme sur n’importe quelle surface, tout ça me paraît déjà si incroyable et me fascine tant que je ne peux songer à utiliser ces crèmes colorées pour tracer des formes qui représenteraient des choses, des personnes, des idées, pour présenter autre chose qu’elles-mêmes. La lumière du soleil vient parfaire ce spectacle et l'anime continuellement.
Vous aurez peut-être noté la présence de fenêtres, de miroirs et de verre parmi ces images. J’aime ces objets car ils créent des effets de lumière. Ce sont presque des tableaux malgré eux, sans peinture, en ce qu’ils délimitent un paysage et nous offrent de le regarder. Car ils absorbent la lumière tout en la laissant passer ou en la réfléchissant, ils la rendent plus perceptible.
La fenêtre : regarder ce qui se trouve à l’extérieur ou à l’intérieur à travers son cadre. Le verre d’une fenêtre est une matière que la lumière traverse avant de pénétrer un espace construit et clos, cerné de murs, de plafonds et de portes. Le miroir : il dessine un paysage dans son reflet. Il me dessine avec ce qui se trouve dans mon dos. Le verre : il laisse voir ce qui se trouve derrière lui tout en réfléchissant ce qui est devant. Fenêtres et miroirs me semblent incarner les deux faces de ce que peut être un tableau : fenêtre, il est ouverture, miroir, il est réflexion de nous-mêmes.
Ainsi, j’ai aimé peindre sur les fenêtres ou parfois comme des fenêtres. J’ai aimé rester proche de cet objet quand je m’enfermais dans cet appartement. C’était ma façon d’être solitaire tout en étant tournée vers ce qui dépasse mon seul être, attentive au bruissement de la ville.
Peindre sur des fenêtres, c’était vouloir faire un tableau qui ne soit pas enfermé dans une surface rectangulaire. Mais une surface volante qui bruisse avec les variations vitales, se diffuse et reste éternellement mouvante au gré des jours et des heures. Un peu subtile, parfois presque invisible.
Un tableau en fragments. Des fragments répartis dans un appartement, qui se composeraient et se décomposeraient dans l’oeil de qui y habite, qui le parcourt, qui le découvre de loin sur un site internet. Je ne peux qu’espérer avoir su partager avec vous mon émotion, sans laquelle ces images et ces mots ne sont que des idées sans lumière.
Un grand mal-être m’habitait, qu’il a fallu que j’expulse hors de l’appartement. Je ne sais pas quand il reviendra, s’il reviendra. Je ne me sens pas à l’abri. Et pourtant je ne m’en souviens plus, je n’arrive même pas à le décrire. Ne reste que ce qui l’a chassé.